« Allah is lesbian » : arrestation au Maroc d’une militante féministe pour un t-shirt jugé blasphématoire.
« Allah is lesbian » : arrestation au Maroc d’une militante féministe pour un t-shirt jugé blasphématoire., le décryptage, le décryptage.fr, ledecryptage, ledécryptage, site, média, presse, news, conflit, guerre, fait-divers, info, journal, économie, justice, decrypt, décrypte, décryptons
Par Ryan •

Ibtissame Lachgar, militante féministe marocaine, a été arrêtée le 10 août et placée en détention à la prison d’Arjat, dans l’attente de son audience prévue le 27 août. La cause : une photo publiée sur X le 31 juillet, où elle porte un t-shirt affichant la phrase : « Allah is lesbian ». Elle est poursuivie pour atteinte à la religion islamique et risque jusqu’à cinq ans de prison et 500 000 dirhams d’amende. Sa demande de libération provisoire a été rejetée le 13 août.
Connue depuis plus de seize ans pour ses positions radicales, antireligieuses et féministes, Betty Lachgar coordonne également en France le Collectif abolition porno prostitution. Si elle est habituée aux actions militantes risquées, c’est la première fois qu’elle est incarcérée. L’affaire a éclaté à la suite d’un post en réaction à une influenceuse exclue d’un événement pour blasphème. Elle y affirmait que l’islam, comme toute religion, est « fasciste, phallocrate et misogyne », accompagnant ses propos d’une photo avec son t-shirt provocateur. Le message a rapidement circulé au Maroc, déclenchant insultes, menaces de mort et appels à signaler l’activiste aux autorités.
Avant son arrestation, elle dénonçait une avalanche d’injures sexistes et de menaces, rappelant que le slogan vient de la militante Anne-Marie Fauret, et qu’il a été réutilisé par d’autres mouvements. Son interpellation a été saluée par des internautes et soutenue par des responsables politiques comme l’ex-ministre islamiste El Mostafa Ramid. La législation marocaine prévoit jusqu’à cinq ans de prison et de lourdes amendes pour atteinte à la religion, notamment en ligne. Souad Brahma, avocate et présidente de l’AMDH, défend que ses propos relèvent de la liberté d’expression garantie par les conventions internationales.
Peu d’associations marocaines ont exprimé leur soutien, certaines estimant que ses propos dépassent les limites. Depuis 2009, avec le Mouvement alternatif pour les libertés individuelles, elle a multiplié les actions symboliques contre la pénalisation de l’avortement et de l’homosexualité, comme le pique-nique en plein ramadan ou le « kiss-in » en 2013. En 2024, son collectif distribuait des pilules abortives interdites au Maroc.
Ce n’est pas pour ses actions de terrain, mais pour un message sur les réseaux sociaux qu’elle est aujourd’hui poursuivie. Ses positions polémiques lui ont déjà valu des exclusions, comme la déprogrammation d’un court métrage en 2022. Depuis son arrestation, elle a reçu le soutien de groupes féministes internationaux, du Front féministe international et de figures comme Anne-Cécile Mailfert. Une pétition a été lancée en France, signée notamment par l’historienne Christelle Taraud, qui défend la radicalité féministe et alerte sur la régression mondiale des droits des femmes. Pour elle, l’affaire illustre la façon dont les femmes sont encore en première ligne face aux atteintes aux libertés.